Mon voyage vers le yoga


une véritable rencontre avec moi-même

Je me souviens encore de mon premier cours de yoga, dans une grande salle à Paris. J’accompagnais une copine, et je ne me suis pas du tout sentie à ma place. Tout était difficile, je n’avais que 20 ans et je me sentais coincée dans mon corps, comme si je n’avais aucune liberté de mouvement. Je n’ai donc pas accroché du tout. Je n’y suis revenue que des années plus tard.

J’ai commencé par une pratique un peu honteuse chez moi, avec des vidéos sur YouTube. Là encore, ce n’était pas fait pour moi. Le positionnement de mon corps n’était toujours pas juste, et aujourd’hui, en repensant à cette époque, ça me fait sourire. Puis, il y a eu un moment où j’ai vraiment eu envie d’y arriver, de ressentir la souplesse dans mon corps. Pas forcément réussir à toucher mes orteils, car il n’y a pas si longtemps, je ne touchais pas mes orteils, mais plutôt mon mi-mollet, avec un dos aussi rond qu’un cerceau (hula-hoop). J’avais le bas du dos coincé, je ne me tenais pas droite, mes jambes ne se tendaient pas totalement, et mes genoux se touchaient.

Je ne voulais pas une souplesse qui se voit de l’extérieur, mais plutôt une souplesse intérieure : la possibilité de me déplacer de manière ample, avec des gestes doux et élégants, qui ressemblent à mon moi intérieur. Et je me suis lancée dans des cours hebdomadaires. J’ai eu la chance d’avoir un prof qui prenait le temps d’expliquer. Je n’ai pas tout entendu de ce qu’il disait, mais avec le recul, je sais qu’il expliquait super bien.

En 2017, lors d’un voyage au Cambodge, j’ai passé 10 jours dans un centre qui proposait trois cours de yoga par jour et une méditation non guidée d’une heure chaque soir après le dîner. J’ai profité de cette immersion pour tester différents profs, différents types de yoga, et j’ai commencé à méditer. Cela a été un premier déclic. J’avais enfin commencé à voir le yoga autrement que comme un cours qui me mettait en difficulté, où je ne me sentais pas à ma place. J’ai ressenti la bienveillance des personnes présentes (élèves et profs), et ce monde était assez nouveau pour moi.  Je me souviens encore que la méditation quotidienne d’une heure, après le dîner, a été un véritable défi. Je n’avais aucune expérience préalable de la méditation, et là, on m’a directement plongée dans l’une des versions les plus complexes : pas de guide, pas d’explication, juste une heure de silence. Dès les premières minutes, le confort m’a échappé. Je ne trouvais aucune position qui me convenait, mes jambes s’endormaient, mes orteils étaient engourdis, et je ressentais ce besoin irrépressible de bouger. Bien sûr, il fallait le faire discrètement, pour ne pas déranger les autres.

Au début, je n’arrivais même pas à tenir plus de 10 minutes dans une position sans que la douleur devienne trop intense. Mais au fil des jours, j’ai compris qu’il me fallait accepter cet inconfort. Au lieu de lutter contre, je commençais à m’installer dedans, à le reconnaître comme faisant partie du processus. Cette première leçon m’a énormément marquée : l’inconfort fait partie de la méditation, il faut l’accepter sans chercher à le fuir.

Quant aux pensées, elles ne cessaient de m’envahir. Chaque minute semblait une éternité. Je n’étais pas en train de « faire de la place » pour un flot de pensées organisées, comme je l’avais espéré. Au contraire, je réalisais qu’elles venaient en vagues, se bousculant et se chevauchant, sans logique ni ordre. Au début, cela m’embêtait, je voulais qu’elles se posent, qu’elles s’organisent. Mais en méditation, le but n’est pas de maîtriser nos pensées, mais d’accepter qu’elles soient là et de leur laisser une place, sans les suivre activement.

Je me suis alors rendue compte que je devais simplement laisser les pensées s’écouler, sans chercher à les organiser ou les juger. C’est un lâcher-prise subtil, qui prend du temps. Pour y parvenir, je devais parfois secouer la tête, comme un petit signal physique pour disperser un peu ce flot, avant qu’il ne reprenne son cours. Petit à petit, j’ai commencé à ressentir que la méditation n’était pas une bataille, mais un espace où il fallait accepter l’instant tel qu’il est, sans rien forcer. Et c’est là que j’ai commencé à comprendre qu’il n’y avait pas d’échec, juste une invitation à accepter chaque moment tel qu’il se présente. J’ai ramené ces pratiques chez moi et j’ai tenté de m’y tenir. Mais après quelques semaines, j’étais de retour dans mon rythme quotidien. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de m’inscrire à deux cours de yoga par semaine. Le silence, la connexion à moi, à mon corps, à mes émotions… c’était exactement ce dont j’avais besoin à ce moment-là de ma vie. Oui, car on vit des transitions dans la vie, et j’en traversais une autre, une séparation professionnelle et personnelle. C’était difficile, mais revenir au corps, au « ici et maintenant », m’a évité de me laisser entraîner dans le tourbillon négatif.

J’ai commencé à mieux contrôler ma respiration. Enfin, pour être plus exacte, à respirer de manière consciente par le nez, à allonger la respiration. D’ailleurs, lorsque je me sentais stressée ou triste, j’expirais de manière audible, ce qui a déclenché des conversations ou situations très drôles.

yoga hatha inde rishikesh

Petit à petit, j’ai retrouvé ce que j’espérais : une souplesse intérieure et mentale, la possibilité de m’adapter plus facilement à des situations. J’ai décidé de me former, non pas pour devenir prof, mais pour améliorer ma pratique, approfondir mes connaissances. Après un an de recherches et de comparatifs, je suis partie en janvier 2020 en Inde pour me former. Je faisais 12 heures de formation par jour, 6 jours par semaine. Lors des jours de repos, je continuais à pratiquer, à apprendre et à échanger avec les profs, les élèves, les personnes rencontrées.

Lors de cette formation, tout a changé. On m’a donné des règles de base qu’on ne m’avait jamais dites auparavant (les épaules basses, le dos droit, le bassin vers l’avant, le menton légèrement rentré, et j’en oublie). J’ai appris à encore mieux contrôler ma respiration, et j’ai enfin compris des postures que je faisais mal depuis des années. En petit groupe, nous devions apprendre à corriger et à donner des directives qui nous parlent, et qui peuvent être comprises.

J’ai aussi découvert que le yoga, tel que je le pratiquais jusqu’à présent, n’était qu’1/8ème de ce qu’est le yoga. Et ça, c’était la grosse surprise ! À l’époque, j’étais persuadée que mon corps avait des limites strictes, qu’on m’avait toujours fait croire que je n’étais pas souple et que certaines postures me seraient inaccessibles. Pourtant, au fil des séances, j’ai appris que les limites que j’imaginais n’étaient pas celles de mon corps. Avec du temps et de la discipline, j’ai découvert que les choses pouvaient évoluer, que mon corps était bien plus capable que je ne le pensais. On m’a enseigné comment améliorer ma pratique, approfondir les postures, et surtout, qu’on n’a pas besoin de tout maîtriser pour avoir la possibilité d’enseigner. Il faut répéter, tenter, essayer de se dépasser, et tout est possible.

À mon retour, j’étais « prof de yoga« , le Covid bousculait encore nos vies. J’ai donc persisté et pratiqué tous les jours. Une de mes plus grandes difficultés personnelles a été la discipline. Forcer cette pratique n’a pas toujours été confortable, surtout que je n’étais pas encore totalement à l’aise avec les capacités de mon corps, donc je me suis « cachée » pour pratiquer. J’ai acheté des livres et j’ai continué à m’éduquer.

Mais la joie, les sensations que je ressens après chaque pratique, étaient tellement agréables, qu’il m’a été impossible de ne pas continuer. C’est ainsi que j’ai décidé de devenir prof et de partager ce que j’avais appris. J’ai continué à prendre des cours, car me laisser entre les mains d’autres profs est tellement agréable et inspirant. Mais j’ai aussi commencé à proposer mes services dans des associations locales, et en 2023, j’ai remplacé ma prof (Martine) à Cervens, deux jours par semaine.

La première année a été compliquée. L’année précédente, j’étais élève, et cette année, j’étais devant les élèves, à enseigner. J’ai commencé mes cours en m’inspirant des profs qui m’avaient le plus marquée, comme JC et Martine. Je n’ai pas voulu trop bousculer les élèves, et petit à petit, j’ai trouvé mon style et mon rythme. Chaque cours est aujourd’hui un moment d’échange, une rencontre qui me touche profondément, et je sais qu’il en est de même pour mes élèves.

Ce voyage vers le yoga a été, et continue d’être, une aventure de découverte, de transformation et d’épanouissement. Chaque étape m’a menée à une plus grande compréhension de moi-même, de mon corps, de mon esprit, et surtout de la bienveillance que l’on peut offrir aux autres. Et aujourd’hui, je suis plus qu’heureuse de pouvoir partager cette aventure avec mes élèves et de les accompagner sur leur propre chemin.

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